
Malgré un potentiel naturel important et un site plutôt exceptionnel, Tabarka reste encore une ville quelque peu marginalisée. On n’arrive toujours pas à trouver la formule idéale pour la valorisation de tous ses atouts. Pourtant, ce ne sont certainement pas les idées qui manquent. Loin s’en faut. Peut-être bien qu’il s’agit d’une question de vouloir.
La Presse —Le train touristique de Gafsa, pour longtemps mis à l’arrêt alors qu’il était l’une des fiertés de la région, a repris, tout récemment, du service. Une remise en opérationnalité très importante pour donner à l’offre touristique de la région plus de profondeur et surtout une touche d’originalité. Un élément très prisé par le marché touristique international.
Et il faut reconnaître que cette remise en fonction répond, en vérité, au souci de nos premiers décideurs de se libérer, progressivement, de l’offre classique et de migrer vers une nouvelle offre écologique reposant essentiellement sur le potentiel naturel local. Une offre capable de garantir une meilleure valeur ajoutée.
On aurait toutefois aimé que cette expérience soit généralisée pour maximiser son impact. Ce n’est malheureusement pas le cas. Cette belle initiative, reste, jusque-là isolée, ce qui limite son apport dans l’offre globale nationale.
Pourtant, certains sites, notamment au Nord-Ouest, semblent bien adaptés non seulement au lancement d’initiatives similaires mais surtout de les réussir, en raison de la spécificité de leur environnement. C’est le cas de Tabarka qui pourrait faire d’une telle expérience un atout touristique de taille.
Un blocage généralisé
On se rappelle d’ailleurs, comme on l’a déjà soulevé à maintes reprises, le projet du lézard vert lancé en 1996 et finalisé en 2002, et qui devrait relier, sur un parcours touristique de 18km Tabarka à la ville de Wechtata, mais finalement bloqué pour des raisons toujours mystérieuses.
Or, un tel projet, engagé par feu Belgacem Wechtati, dans le cadre d’un partenariat public-privé, devrait apporter, selon toutes les études de faisabilité et de rentabilité, une valeur ajoutée certaine à l’offre touristique locale, et à la ville du corail dans son ensemble. Et malgré toutes les tentatives de relance, c’est toujours l’apathie. On dirait qu’un tel projet dérange. D’ailleurs, ce blocage n’est pas isolé. D’autres idées aussi importantes ont été retenues mais jamais conclues. A tel point que certains observateurs ont commencé à parler de sabotage ou encore de blocage volontaire.
On peut citer, à ce stade, le projet d’une ligne périphérique, qui s’inscrit, lui-même, dans le cadre de« Costa Coralis Jendouba-Tabarka ». Un mégaprojet, retenu en 2016, pour un investissement de 2 milliards de dinars, et étendu sur 140 hectares avec un potentiel d’emploi d’environ 12500 postes et qui devrait transformer la région en station touristique et économique d’envergure. Une idée prédestinée, tout à fait conforme au potentiel réel de la région. L’idée d’une ligne périphérique a été dictée donc par le souci d’assurer aux touristes un meilleur accès aux différentes infrastructures prévues par le mégaprojet. Mais les deux idées sont toujours à un stade virtuel, faute de souplesse administrative et surtout de financement.
On peut citer aussi le projet Montazah Tabarka, lancé au début des années 90, et qui devrait transformer, en profondeur, la physionomie non seulement touristique mais économique de l’ensemble de la région, mais qui est resté, aussi, au stade des projections. Autant d’éléments qui traduisent un «blocage-mystère».
Ce qui préoccupe encore plus, c’est que les malheurs de la ville de Tabarka ne se limitent pas au non aboutissement des nouveaux projets, mais ils le dépassent pour toucher ce qui est déjà acquis. En témoigne la dévalorisation, de plus en plus manifeste, des principales ressources de la région. Il suffit de rappeler, à ce stade, le corail rouge qui a constitué, des décennies durant, la principale source de revenu de la population, mais qui connaît depuis quelque temps une dépréciation grave, faute de gestion et de protection. Pourtant, ce produit aurait pu assurer à Tabarka un essor économique global et durable.
Et on garderait certainement en mémoire comment Torre del Greco, cette petite ville au Sud de Naples, qui s’est transformée, en l’espace de quelques années seulement, d’une localité extrêmement pauvre en pôle socioéconomique performant. Aujourd’hui, elle est qualifiée même du centre international de la transformation du corail rouge. Mieux encore, elle a été reconnue, officiellement, comme patrimoine mondial de l’Unesco. Un simple parallèle qui mesure l’ampleur du gâchis de la ville de Tabarka. Aujourd’hui, il est nécessaire de revoir, en profondeur, la situation de cette ville du Nord-Ouest et repenser les parades nécessaires à la valorisation de son potentiel. Une nécessité qui s’inscrit au cœur même du nouveau modèle de développement initié par le Chef de l’Etat et qui fait de la région un fondement incontournable.